Obama cherchera à renforcer la coopération avec l’Europe

 Le Cercle des Européens : L’élection de Barak Obama à la présidence des Etats-Unis d’Amérique revêt un caractère historique. Quelle signification lui attribuez vous, pour l’Amérique et pour le monde en général ?

Constance Borde : A ce moment particulier de l’histoire du monde et des Etats-Unis, après 8 années de politique unilatérale de l’administration de George W Bush et une détérioration des relations entre les Etats-Unis et le reste du monde ; sans mentionner la crise économique à laquelle le monde doit faire face, l’élection de Barak Obama ouvre la voie à des changements profonds dans les modes de pensée et les attitudes de mon pays.

Que pensez-vous du titre du New York Times qui le lendemain de l’élection titrait : "La barrière raciale est tombée" ?

Les barrières raciales son en effet tombées aux Etats-Unis. L’élection d’un Président Africain-américain à une signification bien plus profonde que ce que l’on peut imaginer. Je crois que dorénavant la question de la race ne sera plus un obstacle à la réussite. Il reste toutefois à s’occuper des inégalités sociales qui se concentrent majoritairement sur la population Noire des Etats-Unis. Barak Obama en fera la priorité de son administration.

Comment avez vous analysé le basculement dans le camp démocrate d’États clés, traditionnellement acquis aux Républicains comme l’Ohio ou la Floride ?

Un pourcentage important d’Américains – y compris dans l’Ohio et la Floride – sont indépendants et voteront pour le candidat qui présente le programme qui correspond le mieux à leurs attentes du moment. Cela a été le cas pour Barak Obama. On peut toutefois noter qu’une nouvelle donnée démographique est apparue lors de la dernière élection, avec une population d’électeurs qui avait perdu la foi en leur gouvernement et dont la confiance a été gagnée par Obama.

Quels vont être les premières mesures d’Obama pour atténuer les effets de la récession et de redémarrer l’économie ? Pour la première fois depuis 1995, les Démocrates contrôlent les deux chambres du Congrès. L’adoption des reformes sera-t-elle pour autant facilitée ?

Obama cherchera à régénérer l’emploi ainsi que les classes moyennes en leur fournissant l’opportunité de se rétablir de la crise qui s’est abattue sur eux. Il a pour cela besoin du soutien du Congrès, ce qui ne sera pas chose facile. Il doit faire passer un plan de stimulation de l’économie d’ici au 15 février, et je crois que ce sera fait. Même si le projet est un peu dilué par le celui de la Chambre des représentants (Pelosi House bill), il restera efficace. Je soutiens fermement ce plan, en particulier la version de la Chambre des représentants. Mais je crains que le Sénat ne le vote en l’état.

Va-t-on assister à une réorientation profonde de la politique étrangère américaine et laquelle ?

Oui, il va y avoir un transfert d’intérêts de l’Irak au Pakistan, comme nous avons déjà pu le constater. Les relations avec la Russie doivent également changer au plus rapidement, ce qui a déjà commencé. Mais la chose qui est certaine, c’est que la configuration mondiale a dramatiquement changé et nous sommes encore en train de combler notre retard en termes de ressources globales et de techniques. Le 11 septembre était un bon exemple du fait qu’il nous reste encore un long chemin à parcourir. Avoir un tel niveau d’engagement en Irak est certainement un problème qu’il nous faudra résoudre. La pression des questions intérieures (dans le domaine de l’économie, de la santé ou de l’éducation) exige une réorientation des priorités diplomatiques et militaires pour une approche plus efficace en termes de ressources.

Barack Obama avait fait allusion lors de la campagne à une manière de dialogue avec l’Iran. Comment voyez-vous la concrétisation de cette orientation et quelles conséquences sur les relations avec Israël doit-on en attendre ?

C’est difficile à savoir. L’Iran ne sera pas un client facile. Les relations doivent en premier lieu changer ailleurs pour que les positions de l’Iran évoluent ensuite dans un sens plus favorable. Les discussions avec la Russie autour de la question du désarmement constituent par exemple un bon départ.

Quel renouveau pour les relations transatlantiques ?

Les relations sont relativement bonnes à l’heure actuelle et les Etats-Unis chercheront l’aide de leurs alliés sur les terrains les plus importants, comme l’Afghanistan, le Pakistan ou la Russie.

Le protocole de Kyoto n’a pas été signé par les Etats-Unis, mais Barack Obama a exprimé la volonté de s’engager dans la lutte contre le changement climatique, en lien ou en concurrence avec la politique européenne dans le domaine ?

Les Etats-Unis travailleront en tandem avec les Européens en suivant les mêmes lignes directrices. La lutte contre le changement climatique sera une priorité.

Pensez-vous que l’Europe comptera plus ou moins pour les Etats-Unis avec Obama, comparé à l’ère de G.W.Bush ?

La politique plus modérée de Bush à la fin de son mandate était différente de la ligne dure adoptée au début. Obama continuera dans ce sens en cherchant à renforcer la coopération avec l’Europe.