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Il est un fait, comme l’a souligné à maintes reprises Pascal Lamy, directeur général de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) que l’Europe, en dépit d’une panne de croissance, reste la principale source et la principale bénéficiaire d’Investissements directs étrangers (IDE). Le marché européen est le plus ouvert du monde. Depuis 1992, la liberté de circulation des capitaux en Europe vaut pour tous les investissements provenant de n’importe quelle partie du monde.
C’est un atout pour garantir le financement de nos entreprises.
Toutefois, faut-il pour autant que l’UE renonce à toute protection de son immense marché et surtout de ses emplois chaque jour plus menacés ? Le discours au Congrès de Barack Obama sur son plan de création d’emplois le 9 septembre montre que les Etats-Unis sont prêts à défendre l’emploi déclaré cause nationale, en favorisant le « made in America » ! L’UE devrait dans la même ligne se montrer plus exigeante vis-à-vis de ses principaux partenaires commerciaux en veillant à un minimum de réciprocité dans les échanges et les investissements ? La Chine, l’Inde et la Russie sont protectionnistes. L’Europe ne l’est pas et ne doit pas l’être. Pour autant, elle a toute légitimité pour placer les relations commerciales sur le terrain de la réciprocité, principe de base du droit des relations internationales expressément consacré par l’OMC.
L’enjeu est de taille puisqu’il s’agit de conserver l’emploi en Europe, alors que s’accélèrent les délocalisations en Asie. Les entreprises européennes en attendent de pouvoir tant produire à des prix plus bas que de gagner des centaines de millions de consommateurs. Mais à quel prix pour l’emploi européen.
Par ailleurs, l’investissement dans les pays « émergents » se fait dans des conditions et à des conditions parfois drastiques. Investir en Inde tient encore du parcours du combattant, en Chine cela passe par la création de filiales communes à 50/50 (en Algérie, depuis deux ans, toute participation dans une entreprise locale est même plafonnée à 49%) L’accès aux marchés publics et aux services reste très limité chez ces grands partenaires.
Malheureusement, les négociations du Doha Round, qui pour les USA et l’UE devaient permettre d’ouvrir davantage l’accès aux marchés de services et aux marchés publics dans ces pays stagnent. Elles ont débuté il y a dix ans, et l’horizon n’est pas prêt de se dégager.
Aussi, la Commission – en la personne de son excellent Commissaire au Commerce, Karel de Gucht – est-elle conduite à multiplier les accords commerciaux bilatéraux. C’est l’occasion d’imposer certaines conditionnalités, en subordonnant par exemple l’application de ces accords au respect par nos partenaires des mêmes conditions d’accueil aux investissements européens que celles réservées dans l’UE à leurs entreprises.
Les législations européennes qui prévoient de telles conditionnalités se comptent sur les doigts de la main (ex.les services informatisés de réservation de transports aériens ne sont à disposition des compagnies des pays tiers que si le transporteur européen bénéficie d’un traitement équivalent à celui du transporteur local ; certaines prestations d’assurance provenant de pays tiers ne sont autorisées que sous réserve de réciprocité).
Plus récemment, la loi française de transposition des directives sur les marchés publics de défense a consacré le droit pour les pouvoirs adjudicateurs d’écarter, de certains marchés, des entreprises de défense/sécurité sous contrôle étranger au nom du principe de réciprocité consacré par l’accord OMC, et ce, dans le but de constituer une base industrielle et technologique de défense européenne. Dans le même esprit, les Commissaires européens Michel Barnier et Karel de Gucht ont lancé une consultation publique sur la question de l’accès aux marchés publics dans les pays tiers. L’objectif est, sur une base de réciprocité, d’inciter les grands partenaires commerciaux de l’UE à donner accès à leurs marchés publics et à démanteler leurs arsenaux protectionnistes.
Cette méthode paraît bien plus efficace que celle des quotas qui ne durent qu’un temps et dont la suppression entraine la faillite du secteur concerné, comme ce fut le cas de l’industrie textile après la levée des quotas d’importations chinoises en 2005. Karel de Gucht a eu raison de rappeler le 2 septembre dernier à l’Université du MEDEF sur le campus d’HEC que l’OMC – en dépit d’une règle paralysante d’unanimité à plus de 150 Etats membres – est plus qu’un forum, c’est un lieu incontournable d’arbitrage. La crédibilité de son panel le fait regarder comme un véritable tribunal commercial international. C’est ainsi grâce à lui que l’Europe a gagné des points dans la querelle Airbus/Boeing. Elle a également à travers ce panel pu plusieurs fois faire avaliser les mesures anti-dumping prises à l’encontre de la Chine dont les exportations d’acier, par exemple, se faisaient à des prix excessivement bas. Mais les procédures anti-dumping sont d’une longueur inadaptée à l’urgence des problèmes soulevés. Et on ne peut les multiplier à l’infini, alors que la question des aides allouées par le gouvernement aux entreprises nationales appelle des solutions plus rapides.
D’où deux propositions pour le court et le moyen terme :
- Réactiver le principe de réciprocité dans le cadre des relations commerciales bilatérales entre l’UE et ses partenaires commerciaux, même si l’on ne doit pas désespérer de voir de nouveau ces relations s’organiser dans le cadre multilatéral de l’OMC.
- Œuvrer pour que l’OMC passe du vote à l’unanimité au vote à la majorité et pour que son panel s’affirme quant à lui comme une véritable autorité mondiale de la concurrence.
https://twitter.com/noellelenoir
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