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Noëlle Lenoir revient lundi 11 juin sur l'enjeu pour l'Europe et son économie de ne pas être dépendantes des fonds souverains des pays émergents pour sa chronique "Les Idées claires" sur France Culture.
Tandis que l’Union européenne se débat pour trouver les moyens de sortie de crise qui assureront sa survie comme puissance économique mondiale, on assiste aujourd’hui à l’inexorable ascension des fonds souverains d’Asie et du Moyen-Orient. Cette prise de pouvoir - qui n’est pas encore très sensible - va bouleverser les relations internationales et la place de notre civilisation.
Comme le montrent les élections dont les thèmes sont essentiellement nationaux, les responsables politiques se gardent bien de mettre l’accent sur ce bouleversement et sur les limites qu’il impose à leur capacité de maîtriser la croissance. A mon avis, il faudrait pourtant avoir le courage d’expliquer aux Européens la réalité des changements à l’œuvre.
On les voit en France à travers les investissements du Fonds souverain du Qatar dans des entreprises comme Lagardère, Vinci, Veolia, Suez ou encore la Société des Casinos de Cannes. Dans l’opinion, ces participations ne sont pas mal venues, car chacun est conscient qu’il faut pouvoir financer les entreprises qui, du fait de la crise, n’ont plus accès au crédit bancaire.
Mais les participations du Qatar sont sans commune mesure avec celles à venir d’autres Fonds souverains, comme ceux d’Abu Dhabi, d’Arabie Saoudite, de Chine, de Singapour, du Koweït, de Russie ou de Norvège qui représentent à eux seuls 4000 milliards$, soit un quart du PNB américain. Autre exemple chiffré : La Banque centrale chinoise, avec ses 3000 milliards$ de devises étrangères, est devenu le plus grand investisseur mondial.
L’agenda de ces Etats et de ces Fonds n’est pas seulement économique, on s’en doute. Il est politique.
Je ne souhaite pas affoler les auditeurs et susciter des pulsions nationalistes qui n’ont que trop tendance de nos jours à se réveiller. Pour autant, j’ai la conviction que la question doit être posée du maintien de l’indépendance de l’Europe dans la perspective de voir passer ses entreprises sous le contrôle de Fonds souverains.
La première réponse, c’est de redresser l’économie européenne et de mobiliser à cet effet. Selon moi, seul le pas fédéral proposé par Angela Merkel et sous certains aspects - comme les eurobonds - par François Hollande, le permettra.
La deuxième réflexion qui s’impose concerne la protection de nos intérêts stratégiques : l’énergie et des infrastructures comme les ports et les aéroports. Pourquoi ne pas réfléchir à un système de golden shares permettant aux Etats, ou mieux encore à l’Europe, de veiller au contrôle capitalistique des secteurs stratégiques ? Les golden shares, vous le savez Marc, sont des actions qui confèrent à celui qui les détient des droits spécifiques qui peuvent être parmi d’autres une minorité de blocage ou la possibilité de s’opposer à certaines participations étrangères. La Commission et la Cour de Justice de l’Union européenne les condamnent systématiquement comme contraires à la libre circulation des capitaux en Europe.
Mais cette interdiction est inadaptée au contexte actuel et elle pourrait être levée si c’était désormais l’Union européenne elle-même, ou un groupement d’Etats-membres, qui détenait les golden shares.
Réhabiliter le système des golden shares serait non pas du protectionnisme, mais l’application pure et simple du principe de réciprocité si tant est que les droits qu’elles confèrent ne s’exerceraient que vis-à-vis des pays qui n’offrent pas à nos investisseurs les mêmes avantages que ceux offerts sur le marché européen.
https://twitter.com/noellelenoir
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