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Rencontre du 25/03/09
Augustin de Romanet
Directeur Général de la Caisse des Dépôts

Augustin de Romanet

Soulignant pour introduire les débats le double défi auquel sont confrontées les entreprises, entre le besoin de "traiter l’urgence imposée par la crise et celui de garder une vision à moyen terme", Pierre Simon, Président de la CCIP, a évoqué les dispositifs mis en place par la Chambre pour répondre aux demandes des entrepreneurs et les conseiller face aux difficultés qu’ils rencontrent.

Le centre de contact client de la CCIP est ainsi devenu la première plate-forme téléphonique pour accéder au Médiateur du crédit .

Noëlle Lenoir à quant à elle souligné l’ampleur des bouleversements économiques, sociaux, politiques et certainement juridiques, suscités par la crise. On assiste au retour en force des Etats dans l’économie et la question est de savoir si cette nouvelle donne est provisoire ou si elle va durablement modifier les rapports entre le marché et la puissance publique. La Caisse des Dépôts et Consignations, a-t-elle indiqué, est au centre de cette problématique.

Tout en rappelant que Pierre Simon est membre de la Commission de surveillance de la Caisse des Dépôts, le directeur général a tout d’abord remercié ses deux hôtes pour leur invitation en indiquant que "les occasions de réfléchir sur sa propre action étaient toujours utiles".
Synthèse de l’intervention d’Augustin de Romanet

La Caisse des Dépôts, de 1816 à 2009

Cette institution sans pareil est née du vote de la première loi de finances de l’histoire de France : la loi du 28 avril 1816, présentée par Emmanuel Corvetto, ministre des Finances de Louis XVIII. A la chute de l’Empire, Louis XVIII hérite d’un pays à l’économie ruinée, devant s’acquitter de lourdes dettes cumulées depuis la Révolution et accentuées par la guerre. Les crises politiques et financières, avec notamment le financement des Cents-jours par Napoléon à partir d’un organisme public, ont de plus détruit la confiance dans le crédit de l’Etat. Dans son discours lors des débats parlementaires sur la loi du 28 avril, Emmanuel Corvetto déclare : "La dette est sacrée, elle repose sur la foi publique (…) La confiance publique rétablira l’équilibre (…) A sa renommée militaire si chèrement payée, la France en fera succéder une moins bruyante et plus salutaire, celle du crédit et de la bonne foi qui est en la source". Ainsi furent posés les fondements de l’organisation financière de la France. Deux nouvelles caisses publiques sont créées aux côtés de la finance privée et de la Banque de France : la Caisse d’amortissement, dédiée à la gestion de la dette publique et la Caisse des dépôts et consignations, en charge de la conservation de fonds privés de toutes origines et symbole de l’Etat dépositaire. Dès son origine, la gouvernance de la Caisse présente deux spécificités. La Caisse est placée sous le contrôle du Parlement représenté au sein de la "Commission de surveillance" et elle bénéficie d’un statut d’indépendance vis à vis de l’administration. Ce statut, selon Augustin de Romanet, est inscrit "dans les gênes de la Caisse des Dépôts".

Les missions exercées par la CDC pour le compte de l’Etat sont variées. Elles vont de l’émission d’emprunts, à l’indemnisation des colons de Saint-Domingue (1821), en passant par le financement de chemins de fer (1850), le financement des écoles primaires du plan Jules Ferry (1880) ou encore l’achat de terrains pour la construction de logements (1950). Dans les années 80-90, la CDC "participe à la modernisation des marchés financiers", notamment par la création des Sicav, de la Caisse d’aide à l’équipement des collectivités locales, devenue Dexia Crédit Local, ou encore de la Caisse Nationale de Prévoyance, ancienne sous direction de la CDC devenue compagnie d’assurance avec une capitalisation de plusieurs milliards d’euros.

Selon la définition donnée par le Parlement, la CDC est en 2009 :"un groupe public qui exerce des activités au service de l’intérêt général et du développement économique". Sa personnalité hybride est inscrite dans la loi. D’un côté, elle est "un établissement public qui exerce des missions pour le compte de l’Etat" (gestion des fonds d’épargne, des retraites, du dossier médical personnel, du pécule des intermittents du spectacle…), au demeurant "à coût nul et à bénéfice nul", les bénéfices étant intégralement reversés au Trésor. D’un autre côté, "la CDC a des filiales concurrentielles" comme la CNP dans le secteur de l’assurance des personnes, Icade dans l’immobilier ou encore Transdev, Egis et Belambra (nouveau nom de vvf) dans le secteur des services.

Un investisseur institutionnel de long terme

Après l’adoption en 2007 par la Commission de surveillance et les pouvoirs publics du plan "Elan 2020", les "doctrines d’action" de la CDC ont été rendues publiques en 2008 dans le prolongement de la Loi de Modernisation de l’Economie.

Alors que la CDC jouait précédemment à la fois "le rôle d’une banque de financement et d’investissement et le rôle d’opérateur de marché", elle s’est recentrée sur une mission d’"investisseur institutionnel de long terme" ce qui s’est par exemple traduit par la dissociation du pôle banque d’affaire des Caisses d’Epargne (Ixis) de la CDC.

Quatre priorités d’intérêt général

A la suite d’une réflexion stratégique sur les "services que la Caisse des Dépôt rend au pays", quatre priorités ont été établies : le logement, l’environnement, l’université et les PME, correspondant toutes "à la fois à des urgences et à une approche de long terme de nos jours plus que jamais nécessaire".

Evoquant "le sens du service public et le sens du long terme des équipes" de la Caisse, le directeur général a fait observer que si "l’intérêt général ne nous appartient pas, il reste que "dès lors que nous sommes capables, entre nous et avec la Commission de surveillance, d’identifier des thèmes relevant de l’intérêt général, nous ne rencontrons pas beaucoup de contradiction".

Concernant le logement, l’objectif est "de diffuser une culture de la performance" dans le management des Offices HLM : dotés d’un régime fiscal avantageux, les organismes HLM ont le devoir de vendre, de rénover ou de construire au minimum 3% de leur parc chaque année. Ce type d’initiative, de même que celle du groupe Société nationale immobilière (SNI -filiale à 100 % de la Caisse des Dépôts) pour l’acquisition de logement en VEFA (Vente en l’état futur d’achèvement) vise, selon Augustin de Romanet, à "introduire de la créativité et à assister les pouvoirs publics dans la dynamisation de la politique du logement".

S’agissant des actions en faveur des PME, la CDC a pris l’engagement en 2006, de donner plusieurs milliards d’euros au capital investissement. Concrètement cela signifie que "la CDC innerve 180 fonds d’investissements français, dont 70 en provinces (de taille diverse), pour faire du capital risque du capital développement". Ce qui permet de remédier à la faiblesse des PME françaises en fonds propres.

Pour ce qui est du soutien aux universités, autre forte priorité, la CDC a par exemple développé un programme de crédits d’étude leur permettant de s’engager dans des plans de rénovation de leurs infrastructures.

La CDC s’attache enfin dans le domaine de l’environnement à mettre au point des mécanismes de "finance carbone" qui sont autant d’incitation pour les entreprises "à adopter un comportement vertueux". Ces dispositifs consistent soit à instaurer des taxes (par exemple sur l’automobile), soit à permettre "aux entreprises qui font des économies d’énergie de mobiliser celles-ci pour créer de la richesse". Augustin de Romanet a à ce titre mentionné la création au sein de la CDC de Sagacarbon, un courtier spécialisé dans les échanges d’actifs CO2 et BlueNext, "première bourse européenne d’échange de crédits carbone".

Le Club des investisseurs de long terme

Force est d’admettre "l’importance macroéconomique des fonds souverains", qui en 2015 représenteront 15 000 milliards de dollars (à titre de comparaison le PIB mondial est de 50 000 milliards de dollars, la capitalisation boursière dans le monde - avant la crise - était de 50 000 milliards de dollars et les actifs des fonds de pension dans le monde : 20 000 milliards de dollars), On peut d’ailleurs s’attendre à ce que des fonds souverains achètent de grandes entreprises dans l’idée de les sortir de la cote.

Investisseur de long terme, la Caisse ne peut néanmoins pas être assimilée à un fond souverain qui requiert trois caractéristiques : appartenir à un Etat, avoir des ressources exceptionnelles (liées soit à des ressources naturelles, soit à des ressources de change, soit à des excédents budgétaires) et ne pas avoir de passif.

A l’initiative de son Directeur général, la CDC a en revanche réuni quatre grands investisseurs institutionnels européens qui ont signé la Charte du Club des investisseurs de long terme : Philippe Maystadt, Président de la Banque Européenne d’Investissement, Franco Bassanini, Président de la Cassa Depositi e Prestiti et Dr. Ulrich Schröder, Président de la KfW. L’action de ce club, que la CDC souhaite élargir à d’autres institutions, notamment à celles des pays émergents, vise à "assurer au plan international la stabilité financière et une croissance économique saine".

Le Fonds d’investissement stratégique

L’idée d’un Fonds stratégique d’investissement est née à partir d’un double constat : l’importance des fonds souverains dans le monde, et " la fonte de la capitalisation boursière" du fait de la crise. Pour le Président de la République, il s’est agi "d’utiliser les outils offerts par la CDC pour créer un fonds d’investissement de taille suffisamment significative pour être un outil d’intervention en fonds propres". L’institution du fonds français s’est inspirée des principes éthiques et de règles de transparence et de bonne gouvernance connus sous le vocable de "Principes de Santiago", élaborés par le groupe de travail international des fonds souverains (International Working Group of Sovereign Wealth Funds (IWG), composé de 26 pays membres du FMI et créé le 1er mai 2008) en marge de l’Assemblée générale du FMI, le 12 octobre 2008.

La gestion du Fonds Stratégique d’Investissement gestion est confiée à la Caisse des Dépôts (le FSI est une société anonyme, détenue à 51% par la Caisse des Dépôts et 49% par l’État et doté à ce jour de 6 milliards d’euros de liquidités). Réuni pour la première fois en décembre 2008, son conseil d’administration comporte outre les représentants de la Caisse des Dépôts (Augustin de Romanet et Alain Quinet, Directeur des finances et de la stratégie du groupe CDC), des représentants de l’État ainsi que des personnalités qualifiées dont Patricia Barbizet, Directeur général d’Artemis (Vice-présidente du Cercle des Européens).

Un Fonds souverain européen ?

Le FSI, a fait valoir Augustin de Romanet, qui n’a "rien à voir avec le refus d’une politique de libre échange" a pour mission d’agir "en tant qu’investisseur avisé", son objet n’étant pas de venir en aide à des entreprises en difficultés, mais dans s’inscrire dans une dynamique économique. Le modèle est –il transposable au niveau européen ? Devrait-on envisager la mise en place d’un FSI européen alimenté par des contributions des Etats-membres ? Quel en serait le statut et les missions ? Ce Fonds pourrait-il contribuer à la relance de l’économie pour aider l’Europe à sortir rapidement de la crise ? Comment s’articulerait-il avec la BEI, par exemple ?

Autant de questions qui ont fait l’objet d’une discussion animée qui s’est terminée par la décision de pousser plus loin la réflexion au sein du Cercle des Européens sur un Fonds souverain européen !


 

Informations sur Augustin de Romanet
Directeur général de la Caisse des Dépôts depuis mars 2007, Augustin de Romanet est également président du conseil d'administration du FSI et d'Egis, et Président fondateur du Club des investisseurs de long-terme. Il a fait l’essentiel de sa carrière dans des cabinets ministériels et dans l’administration. Avant d’être nommé Secrétaire général adjoint à la Présidence de la République en 2005, il a successivement été Directeur du cabinet d’Alain Lambert, ministre délégué au Budget et Directeur adjoint du cabinet de Francis Mer, ministre de l’Economie (2002-2004), Directeur du cabinet de Jean-Louis Borloo, ministre de l’Emploi (2004), et Directeur adjoint du cabinet du Premier ministre Jean-Pierre Raffarin (2004-2005). A sa sortie de l’ENA, il rejoint la Direction du Budget du ministère de l’Economie et des Finances, où il passera au total près de 10 années. Ces fonctions le conduisent également à Bruxelles, en tant qu’attaché financier au sein de la Représentation permanente de la France auprès des Communautés européennes (1990-1993).
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