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Rencontre du 8/10/09
Pierre Lellouche
Secrétaire d'Etat aux Affaires européennes

Pierre Lellouche

Nommé Secrétaire d’Etat aux Affaires européennes le 23 juin 2009, lors du dernier remaniement ministériel, Pierre Lellouche a pris en charge ses nouvelles responsabilités à une période charnière pour l’Union européenne.

Au lendemain des élections européennes du 7 juin, la désignation du nouveau président de la Commission européenne constituait la priorité politique numéro un du nouveau Parlement élu, mais aussi de la présidence suédoise et des Etats membres. Parallèlement, toutes les attentes étaient tournées vers l’Irlande, où les citoyens allaient décider du sort institutionnel de l’Europe en revotant sur le traité de Lisbonne. Tout cela sur fond de crise économique et sociale en Europe et de nécessaire réforme du système financier international, avec en ligne de mire le très attendu sommet du G20 à Pittsburgh.

Un nouveau Président de la Commission à la légitimité incontestée

Reconnaissant que cette rentrée européenne particulièrement chargée avait été source d’une certaine anxiété, le Secrétaire d’Etat a affirmé que l’Europe venait de traverser "une bonne séquence". Il a en premier lieu salué la reconduction de José Manuel Barroso à la présidence de la Commission. Le refus des députés européens de se prononcer sur cette candidature dès la session inaugurale de juillet puis les incertitudes qui ont longtemps pesé sur l’issue du vote ont en effet pu causer quelques sueurs froides à la présidence suédoise tout comme aux Etats membres qui, soucieux de mettre rapidement en place le nouvel exécutif européen, avaient dès le mois de juin, unanimement soutenu la candidature du Président sortant. Pierre Lellouche a dans ces circonstances, insisté sur la majorité absolue recueillie par José Manuel Barroso lors du vote du 16 septembre , indiquant que celui-ci avait rallié des voix bien au-delà de son propre camp (le PPE compte 263 membres tandis que José Manuel Barroso a été élu par 382 voix).

Le G20 de Pittsburgh : "un succès européen"

Organisé du 24 au 26 septembre 2009, le G20 de Pittsburg devait permettre dans la lignée de celui de Washington en novembre 2008, puis de Londres en avril 2009, de traduire par des actes les précédents engagements et d’avancer concrètement dans la réforme du système financier international. Affirmant que ce sommet s’était "remarquablement déroulé", Pierre Lellouche a tout d’abord mis l’accent sur le changement majeur que représentait l’institutionnalisation du G20, acté dans les conclusions de Pittsburgh . "A côté du Conseil de sécurité de l’ONU, le G20 constitue une nouvelle enceinte politique et économique mondiale regroupant les pays industrialisés et les pays émergents" , a-t-il affirmé. Le G20 remplacera désormais le G8. Le Secrétaire d’Etat n’a pas manqué de souligner que cette initiative revenait largement au Président français qui en plein cœur de la crise financière, en novembre 2008, avait exigé du Président américain George W. Bush, la tenue d’un sommet réunissant les 20 plus grandes puissances économiques mondiales.

Sur le fond, Pierre Lellouche a indiqué que "les conclusions du G20 de Pittsburgh, reprennent point par point la lettre adressée par Nicolas Sarkozy et Angela Merkel" à la présidence suédoise, en amont du sommet. Egalement signée par le Premier ministre britannique, Gordon Brown, cette lettre avait pour objectif de définir la position commune des Européens afin de peser lors du sommet de Pittsburgh. L’encadrement des rémunérations dans le secteur financier, le renforcement de la supervision au niveau international pour prévenir une nouvelle crise systémique, la lutte contre les paradis fiscaux et la réforme du FMI constituaient les principales exigences des 3 chefs d’Etats. Selon le Secrétaire d’Etat, ce succès "démontre la martingale gagnante de l’Europe depuis le déclenchement de la crise". "Quand une idée franco-allemande parvient à agréger l’ensemble des 27, l’Europe peut faire bouger les autres puissances, en premier lieux desquelles les Etats-Unis, mais aussi la Chine ou l’Inde", a affirmé avec conviction Pierre Lellouche. Dans la perspective du prochain grand rendez-vous international : la conférence de Copenhague sur le climat en décembre, il a invoqué "la capacité de l’Europe à se mobiliser et à peser".

Le "oui" irlandais ou la confirmation que la solution passe par l’Europe

Après avoir rejeté le traité de Lisbonne le 12 juin 2008 à 53,4% des suffrages, les Irlandais qui étaient appelés à se prononcer une seconde fois sur le texte, le 2 octobre 2009, ont voté "oui" à plus de 67%. Il s’agit d’un vrai succès a affirmé le Secrétaire d’Etat. Livrant son analyse du vote il a ajouté que : "les Irlandais ont défendu leurs intérêts nationaux en considérant que la solution à leurs problèmes passait par l’Europe et non par un voyage solitaire". La crise économique particulièrement aigüe que traverse l’Irlande, avec une récession profonde (autour des -9% en 2009) et un taux de chômage en flèche (estimé à 15% en 2009), a en effet largement contribué à la victoire du "oui". Pierre Lellouche a également estimé que les garanties juridiques accordées à l’Irlande lors du Conseil de juin 2009 – négociées depuis la présidence française au second semestre 2008 – ont permis d’avoir un débat serein, non pollué par l’exploitation d’arguments comme la fin de la neutralité militaire ou la perte de souveraineté en matière de législation sur l’avortement, thèmes qui avaient irrigué la première campagne.

Concluant cette première partie de son intervention, le Secrétaire d’Etat a affirmé que si cette rentrée européenne avait été si réussie, c’était en grande partie grâce au rôle de la France. Un propos revendiqué devant un grand nombre d’Ambassadeurs des 27 : "la France est à l’initiative en Europe".

L’obstacle tchèque à l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne

Pierre Lellouche a mentionné le nouveau recours déposé par un groupe de sénateurs de l’ODS (parti de Vaclav Klaus) devant la Cour constitutionnelle tchèque, alors même que celle-ci s’était prononcée à l’unanimité, en novembre 2008, sur la constitutionnalité du traité avec la loi fondamentale tchèque. Le Secrétaire d’Etat a à ce propos indiqué que les sénateurs avaient été déboutés il y a deux jours sur un premier recours concernant les clauses passerelles prévues par le traité de Lisbonne. Il a également mis en avant la volonté de la Cour tchèque d’accélérer ce processus, tout en espérant "une réponse rapide". Ce nouvel obstacle pourrait toutefois retarder de 2 à 6 mois l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne initialement souhaitée par la présidence suédoise pour le 1er novembre 2009. Rappelant que le Parlement et le Sénat tchèques avaient tous deux ratifié le traité (en février et mai 2009), Pierre Lellouche a affirmé que "dès lors que le processus juridictionnel de ratification est complété, le Président Vaclav Klaus est tenu de signer le traité". "La signature n’est pas une question d’opportunité politique mais c’est une compétence liée, sinon cela pourrait être interprété comme un déni de démocratie", a-t-il ajouté.

Si Pierre Lellouche a émis des doutes quant à la possibilité de mettre en place les institutions du traité de Lisbonne avant la fin de l’année, avec en particulier la nomination du président stable du Conseil européen et du haut représentant pour les affaires étrangères, il a mis en exergue les conséquences directes de ce retard au niveau de l’entrée en fonction de la nouvelle Commission. Le mandat de l’actuelle Commission européenne s’achève en effet le 31 octobre 2009, soit quelques jours après le Conseil européen. Deux options se présentent aux chefs d’Etat : soit l’actuelle Commission est prolongée, soit une nouvelle est composée sous les règles du traité de Nice ce qui induira la réduction du nombre de commissaire, comme l’a rappelé Pierre Lellouche. Le traité de Nice stipule en effet que le nombre de commissaire doit être inférieur au nombre d’Etats membres, soit 26 au maximum.

Le couple franco-allemand en 2009 : entre entente et unité

"Nous vivons la fin de la seconde phase de la construction européenne", a déclaré Pierre Lellouche. La première, couvrant la période entre 1945 – 1989, a consisté en "la construction du marché commun sur la colonne vertébrale que représente la réconciliation franco-allemande". La second phase qui s’étend de 1989 à 2009 marque "la réussite de la réunification de l’Europe dans la paix", avec en point d’orgue l’élargissement de 2004 aux 10 pays d’Europe centrale et orientale. Si le Secrétaire d’Etat n’a pas minimisé la portée de cet "immense succès", il a toutefois noté que "pendant tout ce temps l’Europe ne s’occupait pas d’autre choses". Depuis le traité de Maastricht en 1992, "l’Europe a couru après ses institutions", a-t-il ajouté avant de poursuivre : "il est temps à présent de relancer les politiques communautaires". Pierre Lellouche a en particulier cité la politique énergétique, "plus que jamais centrale après la CECA", la politique industrielle, les technologies vertes, la politique de l’immigration ou encore la politique de sécurité et de défense commune. Tout en écartant les tentations hégémoniques, il a estimé que le couple franco-allemand devait tenir une place centrale dans cette nouvelle phase et que "la crise avait renforcé sa dimension stratégique". "Nous avons à présent dépassé le stade de la réconciliation, il faut passer à ce que le Président de la République appelle l’entente, ou ce que j’appelle l’unité".

La question de l’adhésion de la Turquie, au moment de la visite en France d’Abdullah Gül

Considéré comme un fervent défenseur de l’adhésion de la Turquie à l’Union, alors que le Président de la République a déclaré y être défavorable, préférant à la place un partenariat privilégié, Pierre Lellouche a été interrogé sur sa position depuis son entrée au gouvernement. Cette question est d’autant plus d’actualité que le Premier ministre turc, Abdullah Gül, effectue depuis le 7 octobre une visite de trois jours à Paris, lors de laquelle il a rencontré le Secrétaire d’Etat. Ecartant toute ambigüité, Pierre Lellouche a assuré suivre la politique de Nicolas Sarkozy sur la Turquie, qui consiste en une hostilité sur le principe de l’adhésion mais un respect de l’engagement à poursuivre – sous certaines conditions - les négociations. 11 chapitres sur 35 sont actuellement ouverts, mais depuis 2006, 8 chapitres restent bloqués du fait du refus d’Ankara de reconnaitre Chypre. La France a par ailleurs bloqué l’ouverture de 5 chapitres au motif qu’ils conduiraient automatiquement à une adhésion.

Après ce premier éclaircissement, Pierre Lellouche a évoqué les enjeux d’une éventuelle adhésion de la Turquie, rappelant que d’ici une trentaine d’années, "ce pays pèserait plus de 100 millions d’habitants, soit plus que la Russie et surtout plus qu’aucun autre Etat de l’Union". Il a par ailleurs décrit "un pays en plein dynamisme, aussi bien politique, démographique et politique", et indiqué que la Turquie vivait actuellement "une phase de réaffirmation identitaire et nationale avec un sentiment patriotique très vigoureux". Le Secrétaire d’Etat a également mis l’accent sur l’importance géopolitique de la Turquie et son implication décisive dans des dossiers comme celui du Proche-Orient ou sur les questions énergétiques. Il a en revanche indiqué, tout comme les négociations le révèlent, des problèmes persistants tels que celui de la liberté d’expression, la place de l’armée dans l’Etat et bien entendu le conflit chypriote. "La situation politique de la Turquie reste à stabiliser", a estimé Pierre Lellouche.

L’importance accordée aux questions géopolitiques

Exposant sa conception de la fonction qu’il occupe depuis le mois de juin, Pierre Lellouche a mis en avant la composition originale de son cabinet. A côté des personnes responsables des politiques communautaires, le Secrétaire d’Etat a tenu à s’entourer d’un conseiller militaire, fait inédit, mais encore d’un conseiller pour les questions énergétiques, pour la politique de voisinage ainsi que pour l’Union pour la Méditerranée.

Illustrant sa volonté de faire progresser la politique de sécurité et de défense européenne, Pierre Lellouche s’est attardé sur les enjeux du conflit en Afghanistan. Ancien représentant spécial de la France en Afghanistan et au Pakistan et donc fin connaisseur de ce dossier, il a soutenu que la solution à ce conflit résidait beaucoup plus dans un travail de reconstruction de l’Etat et d’aide économique que dans des choix tactiques militaires. Malgré l’importance géostratégique de ce conflit, le Secrétaire d’Etat s’est étonné du manque de dialogue sur ce dossier entre les responsables européens. "Il ne suffit pas d’attendre que les décisions viennent de Washington", a-t-il affirmé. Il a en premier lieu exhorté les Européens à renforcer la coopération entre les différents contingents des Etats membres engagés sur le terrain. On compte au total, 21 000 soldats européens en Afghanistan. Les plus gros pourvoyeurs de troupes sont la Grande-Bretagne, l’Allemagne, la France, l’Italie ou la Pologne.

Alors que le Président Obama a récemment renoncé à la mise en place du bouclier antimissile en Europe centrale, tel que conçue par Georges Bush, et que la non-prolifération nucléaire est cœur des discussions internationales du moment, Pierre Lellouche a également incité l’Union européenne à prendre position sur cette question du nucléaire et de la dissuasion militaire.

Si compte tenu de "sa vision du job", le Secrétaire d’Etat a pris à bras le corps ces questions géopolitiques, nul doute que l’Union européenne qui cherche à affirmer sa voix dans le monde pourrait en bénéficier.


 

Informations sur Pierre Lellouche
Secrétaire d’Etat chargé des Affaires européennes depuis juin 2009, Pierre Lellouche est également Député de Paris depuis 1997. Expert en questions internationales, il est membre de la Commission de la Défense nationale et des forces armées à l’Assemblée nationale et a été le Représentant spécial de la France pour l'Afghanistan et le Pakistan, de mars à juin 2009, avant de rejoindre le Quai d’Orsay. Il a également présidé la délégation française à l'assemblée parlementaire de l'Otan. Depuis 2005, il est Secrétaire national à la Défense au sein de l’UMP. Titulaire d’un doctorat en droit de Harvard, Pierre Lellouche est avocat au Barreau de Paris.

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